Mis à jour le
18/9/2025
Plus que jamais dans l’air du temps, la dernière édition du salon Maison & Objet faisait la part belle aux pièces de mobilier et aux matériaux aussi éco-orientés qu’intelligents. Revue de détail. Par Claire STEVENS.
La chute comme commencement : trop souvent sacrifiés, les restes – de marbre, de métal, de bois – générés par la production industrielle sont ici transformés pour en faire du mobilier durable à se transmettre de génération en génération. Mais l’approche écoresponsable de C’est Bien Fait ne s’arrête pas là : décidés à repousser les limites du « low tech », ses fondateurs privilégient également certains assemblages traditionnels (tenon - mortaise plutôt que clous, colle ou vis, par exemple), des montages et démontages faciles, puisque sans outils, la livraison du mobilier à plat… Ainsi, à terme, que la fabrication de certaines pièces par des personnes en situation de handicap ou emprisonnées, dans une démarche 100% RSE.
Nos coups de cœur : Versatiles mais aussi totémiques, les tables Bikone et Accorde-Moi, dont on peut choisir la finition des pieds comme du plateau.
Cécile et Raphaël ont commencé à concevoir des objets en béton presque par hasard en 2022. Trois ans plus tard, ils en ont fait leur matériau de prédilection, qu’ils transforment et déclinent en appliques, en vasques, en pieds de tables et surtout en carrelage mural ou pour le sol. Des teintes organiques splendides réalisées à partir de pigments d’origine provençale, une production en petites séries pour éviter les surplus, un traitement adapté quelle que soit l’utilisation… Le duo marseillais peut se vanter d’avoir créé, depuis le garage familial d’où ils travaillaient jusqu’à récemment, un produit hautement désirable et qui n’a pas fini de faire parler de lui.
Nos coups de cœur : L’applique Ella, la vasque Istria, le carreau de béton format « briquette » (5 x15), parfait pour réaliser des crédences.
Recycler le textile pour en faire des revêtements muraux beaux et isolants phoniquement, c’est le credo de cette entreprise qui produit exclusivement dans l’hexagone. Broyée, chauffée, la fibre sourcée uniquement en France et en Belgique est transformée en plaques de 12mm d’épaisseur qui se collent aux murs sans effort. Le matériau obtenu peut aussi être découpé, et s’adapte donc à divers emplois. Léger, ludique, il se décline en de nombreuses teintes, du blanc calcaire au bleu ardoise (obtenu en utilisant des vêtements de pompier et de gendarmerie).
Notre coup de cœur : Chaque année, plus de 5000 tonnes de peluches terminent à la benne. Recyclées par Pierreplume – qui contribue ainsi à en développer la première filière française de valorisation – elles donnent naissance à la gamme Plush, délicieusement colorée.
Cette maison bordelaise spécialisée depuis trois générations dans le staff – alliage de plâtre et de sisal, parmi les plus sains qui soient dans le domaine de la construction – ne se contente pas de perpétrer cette technique dans des édifices historiques dont elle restaure moulures et plafonds. Désormais, Garabos propose aussi à la vente des panneaux ornés de motifs floraux ou végétaux, tous splendides, et qui rendent hommage au savoir ancestral de l’entreprise tout en prisant une certaine modernité. Disponibles à la pièce sur le site de l’entreprise, ils deviendront « statement pieces » dans un couloir, une entrée, une cuisine ou même un salon.
Notre coup de cœur : La collection Zéphirine et sa déclinaison de bas-reliefs gourmands (poire, chou-fleur, homard, artichaut…).
Avec Loumy Lab, le designer Lucas Peyre s’est lancé dans une quête presque anachronique : proposer des luminaires minimalistes, édités en très petites quantités, et faits pour durer – à l’opposé, donc, du mercantilisme et de l’obsolescence programmée chers à notre époque. Ses très belles créations sont réalisées en frêne olivier produit dans des forêts de Moselle gérées durablement, à quelques dizaines de kilomètres seulement de l’atelier. Chacune de ces pièces design est fabriquée à la main et numérotée.
Nos coups de cœur : le lampadaire Triptyque, la lampe de table N2, dont l’esthétique sans concession n’est pas sans rappeler le travail de Charlotte Perriand – influence revendiquée.
Jules Régis, un cas à part : ce franco-italien qui a étudié le design à Glasgow et à Londres dessine et produit des chaises et fauteuils sidérants, façonnés dans la ville de Palerme, dont il a fait son fief. Il y achète également ses matériaux, et y travaille main dans la main avec des artisans locaux (rempailleur, forgeron). Iconiques, uniques, ses créations empruntent autant à la grammaire du sculpteur Calder qu’au design de Raymond Loewy, une touche d’humour en supplément.
Nos coups de cœur : La chaise Falcone aux accents rétro-futuristes, le fauteuil Spider en bois de chêne et cordage tressé.
Des chaises, des armoires à linge, des cadres de lit et même des portes… C’est tout un univers que le Néerlandais Teun Zwets, adepte d’une approche intuitive et fervent amateur de matériaux de récupération, a choisi de développer à partir de bois fendu. Singulières, oniriques, ses créations séduisent autant par leur esthétique que par leur procédé de fabrication, le designer trentenaire allant parfois jusqu’à les laquer à la peinture pour voitures. « Les rebuts des uns font le bonheur des autres », martèle-t-il. Pour un résultat forcément stupéfiant.
Nos coups de cœur : Dans la collection Spitted, l’applique murale et les tabourets à empiler, qu’on croirait tous droits sortis d’un film de Tim Burton.
Diplômé de l’École Boulle, ce sculpteur inspiré présentait durant la dernière édition du MOM une série de colonnes en bronze patiné, totems qu’on verrait aussi bien prendre place dans des lobbies d’hôtels que dans des habitats privatifs. Installé près de Toulouse, Samuel Latour sculpte également le bois (noyer, frêne…). Il le source exclusivement en Occitanie, en se fournissant principalement auprès de petites scieries indépendantes. Soutenu par la Fondation Rémy Cointreau et la Michel-Angelo Foundation, qui distinguent l’excellence des métiers d’art et du savoir-faire contemporain, Samuel Latour s’est récemment lancé dans la conception de petites pièces de mobilier.
Notre coup de cœur : la table basse Collision, en bronze et poirier (édition limitée à huit exemplaires), pièce de collection qui n’est pas sans rappeler le travail comme la liberté formelle du maître de la sculpture Constantin Brancusi.